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Location en meublé indirecte : Échec au fisc

(CAA Marseille, 31 mars 2023, n° 21MA00318)

On sait que l’activité de location d’un immeuble meublé est commerciale et qu’une société civile qui perçoit des recettes commerciales pour une part excédant 10 % de son chiffre d’affaires relève obligatoirement de l’impôt sur les sociétés.

Or, nombreux sont les contribuables qui ont acquis leur résidence secondaire à travers une SCI afin d’éviter une situation d’indivision lors de la transmission du bien. En effet, autant la SCI n’est pas adaptée pour la détention de la résidence principale, puisqu’elle fait perdre au propriétaire l’abattement de 30 % sur la valeur déclarée pour l’Impôt sur la Fortune Immobilière, autant cette structuration est fréquente pour les résidences secondaires dont les propriétaires ont la faiblesse de croire que leurs enfants voudront conserver ensemble la maison où ils ont passé toutes leurs vacances dans leur jeunesse.

Malheureusement, les choses ne se passent pas toujours comme prévu et fréquente est la situation où des propriétaires âgés détiennent une résidence secondaire dans laquelle personne ne vient plus l’été mais dont il faut continuer à acquitter les charges. Or, grâce à l’émergence des plateformes comme AirBnB et Booking.com, les mettre en location saisonnière est devenu un jeu d’enfant.

Sensibilisés à la question du statut fiscal des revenus de la SCI et du piège à contribuable de son assujettissement à l’impôt sur les sociétés en cas de location meublée, des contribuables ont eu l’idée de prendre le bien en location nue à l’année et de le louer meublé au cours de l’été.

Se fondant sur des jurisprudences d’un autre âge où le régime des revenus fonciers était plus attrayant qu’aujourd’hui (par ex., CE 10 juillet 1985, n° 40789), l’administration a tenté d’assujettir la SCI à l’impôt sur les sociétés sur le fondement de la théorie de la location meublée indirecte.

La Cour de Marseille lui donne sèchement tort en considérant que rien n’interdisait aux locataires, associés minoritaires de la SCI, de sous-louer l’immeuble qu’ils avaient garni de leur propre mobilier et que cette sous-location dont ils avaient déclaré seuls les revenus ne pouvait « polluer » le statut fiscal de la société.

Cette décision mérite d’être pleinement approuvée. Sauf abus de droit qui n’était même pas invoqué et qu’elle aurait eu bien du mal à établir, on ne voit pas pourquoi l’administration pourrait écarter les conventions sincères des parties et priver ainsi les contribuables de toute possibilité de donner ponctuellement en location meublée leur résidence secondaire.

En l’espèce, les contribuables avaient choisi de mettre en oeuvre un schéma complexe faisant intervenir une location nue à l’année et une sous-location saisonnière en meublé. Cette solution était vraisemblablement rendue nécessaire au cas particulier puisqu’ils étaient minoritaire dans la SCI. S’ils avaient possédé au moins l’usufruit de la quasi-totalité des titres, ils auraient pu se limiter à se faire conférer la jouissance gratuite du bien par la société dans le cadre d’un commodat et  ainsi sous-louer le bien en meublé.

Tant que l’administration ne trouve trace au bilan de la SCI ni des meubles, ni des recettes des locations meublées, il n’y a aucune raison qu’elle puisse assujettir cette dernière à l’impôt sur les sociétés.

Pour paraphraser un célèbre slogan anarchiste, le temps est fini où sous-location rimait avec piège à c… !